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Cinq futurs possibles à l'horizon 2040-2050

il y a 3 ans
Les « Echos » ont exploré le dernier rapport « Vigie » de l'institut de prospectives Futuribles, dont la parution est prévue en mars. Climat, santé, emploi : voici ce que sera le monde de demain.

Ce rapport a tout l'air d'une boule de cristal, mais - chut ! - ne prononçons surtout pas ces mots. Les « Echos » ont consulté, avant sa sortie grand public le 15 mars. Le dernier rapport baptisé « Vigie » de l'institut de prospectives Futuribles.

Ses 274 pages ne prédisent ni ne prévoient l'avenir comme le ferait un objet de divination, si tant est que cela fonctionne. De manière plus modeste, mais sûrement plus efficiente, le document ambitionne plutôt d'aider à entrevoir le monde de demain, en particulier dans les domaines de l'environnement et de l'économie. Pour cela, 24 auteurs ont étudié.

Grâce à cet examen des tendances à l'oeuvre, au repérage des inflexions envisageables et à la détection de certains « signaux faibles », ils en déduisent 16 scénarios pour l'horizon 2040-2050. Nous en avons retenu cinq.

Climat : la température augmente de 3 °C

Le rapport commence par un scénario noir. Nous sommes en 2050 et la courbe des émissions de gaz à effet de serre a poursuivi sa mortifère ascension du fait de l'activité humaine. Résultat : le mercure affiche en moyenne 3 °C de plus que lors de l'ère préindustrielle.

L'Accord de Paris (2015), et son ambitieux objectif de limiter la hausse à +1,5 °C n'est plus qu'un lointain souvenir… Il aurait fallu pour l'atteindre, réduire de 8 % par an les émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2030. Raté.

Ce réchauffement se traduit par une accélération et une aggravation des phénomènes climatiques extrêmes. La montée des océans grignote les côtes et menace Dakar, Buenos Aires et Lima. Ailleurs, des vagues de chaleur humide ou des inondations à répétition font vivre un enfer aux populations.

Dit le rapport. Parfois, ce sont les gouvernements eux-mêmes qui organisent ces départs, notamment au Vietnam, au Laos, en Tanzanie ou au Mozambique. Un milliard de personnes ont migré ou envisagent de le faire.

Cette météo extrême (tempête, canicule…) fait par ailleurs exploser le nombre de victimes de catastrophes naturelles. L'Organisation mondiale de la santé anticipe 250.000 décès supplémentaires par an. Les infrastructures (transport, production d'énergie, logistique) sont elles aussi exposées, ce qui a pour conséquence de perturber les chaînes de valeur et, in fine, toute l'économie mondiale.

Santé : pandémies en série

Et si la crise du Covid-19 n'était que le premier épisode d'un long feuilleton ? Le rapport prend très au sérieux le scénario selon lequel une explosion des maladies infectieuses provoquerait des crises sanitaires en série d'ici à 2040.

L'étalement urbain, l'agriculture et la déforestation augmentent en effet les contacts entre les animaux sauvages et l'humain, l'exposant de plus en plus aux « zoonoses », ces infections qui se transmettent de l'animal à l'homme. Le développement de l'élevage intensif et la hausse des températures amplifient le phénomène. L'ère des pandémies ne fait que commencer.

Les conséquences de ces pandémies en série sont innombrables. Pour la plupart, elles ressemblent à celles que l'on subit aujourd'hui. Les concerts et les matchs de football réunissant plusieurs milliers de personnes sont très limités afin d'éviter la création de super clusters. Sur le plan économique, les échanges internationaux de marchandises et les flux de personnes se recomposent à l'échelle régionale ou entre Etats ayant établi des règles sanitaires communes. Le rapport ne dit pas comment, mais le tourisme, l'hôtellerie, la restauration et le secteur aéronautique, trop souvent mis à l'arrêt, sont obligés de se réinventer.

Electricité : le renouvelable supplante les fossiles

Ce vieux rêve écologiste n'est plus très loin de se réaliser. En 2040, 70 % de l'électricité produite dans le monde est désormais renouvelable. Une « véritable rupture technique » permet de diviser par quatre le prix du kilowattheure de l'énergie solaire. De son côté, le coût de l'électricité éolienne baisse d'un tiers en terrestre et de 20 % en mer. Ces deux énergies deviennent bien plus rentables que le pétrole et le charbon, fortement émetteurs de gaz à effet de serre.

L'envolée attendue du prix des hydrocarbures, entre 2020 et 2040, ainsi qu'une forte hausse du prix de la tonne de CO2 négociée sur le marché européen, crédibilisent ce futur possible. Le rapport se prononce aussi sur des « progrès technologiques majeurs sur les batteries ». Ainsi, l'énergie solaire et éolienne produite en surplus peut enfin être stockée et réinjectée dans le réseau la nuit ou quand le vent ne souffle pas. La question de l'intermittence du renouvelable est quasi réglée.

Par ailleurs, d'autres usages, comme le chauffage urbain ou les transports, abandonnent peu à peu gaz et carburant au profit de l'électricité. Ainsi, en 2040, « la part des usages énergétiques sous forme électrique atteint 40 à 50 % dans le monde, contre 20 % aujourd'hui ».

Emploi : le marché du travail se reconfigure

Nous y sommes. Des intelligences artificielles (IA) atteignent enfin, en cette décennie 2040, un niveau de maturité tel que 20 à 30 % des métiers sont en partie ou à 100 % automatisables. Dans ce scénario, le remplacement de l'humain par des robots est « particulièrement prégnant dans l'industrie manufacturière ». L'Asie n'est plus l'usine du monde. La production est relocalisée au plus près des consommateurs, les machines coûtant encore moins cher que la main-d'oeuvre des pays à bas coûts.

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A l'inverse, la production immatérielle, sous l'effet de crises (sanitaires, environnementales, géopolitiques), est bien plus éparpillée qu'aujourd'hui. La nécessité de résider à proximité de son entreprise disparaît grâce aux outils numériques. « Le modèle qui s'impose est celui de plateformes de travailleurs indépendants et collaborant ponctuellement sur des projets », anticipe le rapport.

La tendance forte est au recul du salariat.

Des professions échappent bien sûr à l'automatisation et au 100 % télétravail, mais sont fortement « contraintes par les outils numériques qui les organisent et les encadrent », à l'image de l'aide et du soin à la personne ou de l'entretien et de la maintenance des bâtiments.

Sécurité : surveillés et consentants

Ce n'est pas la Chine, mais cela y ressemble un peu.

En 2040, les populations des démocraties seront elles aussi surveillées ou, a minima, tracées. La numérisation des services publics et nos renoncements à une part de notre vie privée en échange de la gratuité de certains services numériques privés sont les tendances qui dessinent ce futur possible.

Les bénéfices attendus de cette surveillance sont nombreux. En matière de santé, par exemple, « les individus seraient mieux protégés. >grâce aux alertes leur permettant d'éviter les lieux ou personnes à risque en cas d'épidémie ». Côté sécurité, le suivi des personnes permettrait de mieux contenir la criminalité et le terrorisme.

L'aversion aux risques pousse en fait les citoyens à réétudier leur conception des libertés individuelles et à considérer que la collecte massive des données personnelles et la surveillance des individus sont « les garanties sine qua non d'un intérêt général redéfini ». Ceux qui refusent ce nouveau pacte social, prévient le rapport, s'exposent à se voir interdire l'accès à certains lieux et services ou à devoir payer des taxes supplémentaires pour préserver leur vie privée.

Author : Kévin Badeau

Article original : 2021-02-16

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